Parlement de la Fédération Wallonie-Bruxelles - Commission de la Culture - lundi 04/02/2019 - Question à la Ministre Gréoli
Récemment,
la Chambre des Compagnies de Théâtre pour Adultes (CCTA) qui regroupe quelque 80 compagnies de théâtre
adulte a publié une lettre ouverte relayant certaines inquiétudes du
secteur des arts de la scène.
J'ai interrogé la ministre sur le sujet, dénonçant les incertitudes et certaines promesses non tenues. (voir la suite en cliquant ci-après)
La CCTA se réjouissait des conclusions de Bouger les lignes voulant «
poser concrètement les jalons d’une politique ambitieuse et connectée aux
réalités des secteurs et de la FWB » et agir sur les structures pour «
être en phase avec les pratiques d’aujourd’hui et anticiper celles de demain ».
Les compagnies de théâtre pour
adultes sont en effet bien placées pour savoir que les modes de productions en
arts vivants ont profondément évolué, et qu’il était grand temps que les
structures s’y adaptent. Ils ont pourtant déchanté. La politique
théâtrale n’a pas pris en compte l’évolution des modes de production. Ils ont cette désagréable impression que le pouvoir refuse d'être à
l'écoute de la réalité du terrain.
Au vu des montants
octroyés, un nombre croissant de compagnies perdant leur aide structurelle ou
bénéficiant d’une aide structurelle insuffisante se verra contraint d'émarger
au maigre budget des aides ponctuelles voué, en principe, à l’émergence de
nouvelles démarches, soit l'avenir du secteur. 14 compagnies de théâtre adulte
subventionnées se trouvaient dans cette situation délicate avant les arbitrages
ministériels. Elles seront 20 dans les cinq prochaines années, alors même que
leur nombre était déjà jugé trop important lors de la précédente législature.
Quelles sont les
perspectives ?
Avez-vous rencontré la
CCTA ?
Que proposez-vous pour
aider ces compagnies de théâtre en difficultés ?
La réponse de la Ministre :
Tout comme vous tous, j’ai été
interpellée ce 23 janvier par la publication d’une lettre ouverte de la Chambre
des compagnies théâtrales pour adultes (CCTA) relative au contexte actuel du
subventionnement des compagnies théâtrales pour adultes, dont le contenu semble
en décalage avec les décisions politiques prises en faveur de ce secteur. (…)
Les propos repris dans «Le Soir» de ce
jour sont bien les miens; le journal n’a pas trahi ma parole. Je n’ai pas pour
habitude d’évoquer de telles images et celles-ci n’étaient pas appropriées. Je
tiens à présenter mes excuses à ceux que mes propos auraient pu blesser. Je
n’aurais pas dû avoir recours à ces expressions. Le rapport que j’entretiens
avec le secteur n’a rien à voir avec l’image d’un Saint-Nicolas. Je reste
convaincue de l’importance de maintenir des espaces de création dans notre
société, et ce, dès la plus tendre enfance. J’ai d’ailleurs répondu au courrier
de la CCTA quelques jours après en avoir accusé réception, confirmant que le
soutien à la création occupe toujours une place centrale dans le cadre de la
réforme, tant pour le secteur des arts de la scène que pour les autres secteurs
culturels. Bien entendu, j’aurais préféré disposer de moyens supplémentaires et
il y a effectivement encore des besoins non couverts. Je vais néanmoins
reprendre quelques chiffres importants qui illustrent cette priorité.
Dès 2018, avec l’accord du gouvernement,
j’ai augmenté significativement le budget dédié aux aides aux projets
théâtraux, par l’apport de 680 000 euros supplémentaires, complétés par 233 000
euros pour 2019. Ce dernier montant a été voté par le parlement en décembre
dernier. Ajoutés aux revalorisations de l’enveloppe déjà opérées en 2015 et
2016, les crédits disponibles pour les projets des compagnies dans le secteur
du théâtre et soumis à l’avis du Conseil de l’aide aux projets théâtraux (CAPT)
ont donc pratiquement doublé au cours de cette législature, passant de 1 130
000 euros à 2 174 000 euros. Je tiens d’ailleurs aussi à rassurer le secteur du
théâtre: il n’a jamais été question de revenir sur l’engagement qui avait été
pris concernant l’augmentation pour 2019. Il est vrai, cependant, que 600 000
euros ont été consacrés à la couverture, en 2018, du phasing out du
Théâtre-Poème et le seront en 2019. C’est donc en 2020 que seront retrouvés les
831 000 euros dont il a été question. En outre, je souhaite vous apporter des
précisions complémentaires quant aux décisions prises concernant les
subventionnements structurels à partir de 2018, fondées sur les avis des
instances compétentes. Pour les compagnies de théâtre pour adultes, 28
structures de création ont reçu un contrat-programme, dont huit qui ne
bénéficiaient jusque-là d’aucune aide structurelle. Cela représente un taux de
renouvellement de 28 %. Pour un total de 3 360 000 euros, ces 28 contrats-programmes
représentent une augmentation de 24 % des budgets dédiés aux aides
structurelles pour les compagnies de théâtre adulte. Certes, cette augmentation
ne rencontre pas les demandes des compagnies formulées dans les dossiers. En
effet, une augmentation des crédits de 158 % avait été sollicitée. Elle ne
correspond pas non plus aux propositions financières des instances compétentes,
formulées sans contrainte budgétaire et qui auraient nécessité une augmentation
de 82 % du budget. Mais cette augmentation de 24 % est particulièrement
importante, compte tenu des moyens complémentaires réservés pour le secteur des
arts de la scène et d’une enveloppe budgétaire, qui malgré cette augmentation,
reste fermée. L’augmentation de 24 % des moyens alloués aux compagnies est
proportionnellement supérieure à l’augmentation de 11 % des budgets. Dans
l’ensemble du domaine artistique des arts de la scène, 105 aides structurelles
ont été attribuées à des artistes dont 23 les ont reçues pour la première fois,
et ce, pour un budget total de 15 275 198 euros. Cela représente une
augmentation de 31 % par rapport à 2016, soit la plus importante du secteur: le
budget des centres scéniques a augmenté de 7 %, celui des festivals de 18 %,
les lieux de création de 8 %, les lieux de diffusion de 13 % et les structures
de services de 12 %. Je suis parfaitement consciente du fait que de nombreux
combats politiques doivent être poursuivis – nous reviendrons d’ailleurs sur
celui relatif au statut des artistes – pour améliorer les conditions de travail
des artistes, mais aussi la création et la recherche, dont on parle très peu!
Ces évolutions témoignent de toute l’importance que j’accorde aux artistes qui
regorgent de talent et de créativité en Communauté française. Enfin – et je
reviendrai sur les quelques questions qui ont été ajoutées oralement à celles
reçues par écrit –, certains d’entre vous m’interpellent sur l’évolution des
dossiers déposés depuis mai 2018, ainsi que sur le calendrier y attenant. Je
tiens à rappeler que mes décisions relatives aux demandes d’aides ponctuelles
ont été envoyées aux opérateurs le 14 novembre 2018. Quant aux demandes d’aides
pluriannuelles, à la demande du CAPT, leur analyse a été confiée au Conseil de
l’art dramatique (CAD) avant d’être réexaminée par le CAPT. Cette dernière
s’est alors exprimée sur les montants à me proposer. Je suis désolée, mais cela
fait partie des demandes qui ont été formulées par les commissions d’avis! Cet
aller-retour – que j’ai autorisé à titre exceptionnel – a naturellement retardé
le traitement de ces treize dossiers. Une décision sera néanmoins prise à leur
sujet très prochainement.
Je peux également comprendre qu’aux yeux
de certains opérateurs, la lenteur des procédures soit particulièrement
difficile à supporter. Je me devais cependant de respecter également le
résultat d’un processus démocratique. Le décret relatif à la future gouvernance
culturelle (…) dont je souhaite l’entrée en vigueur depuis ma prise de
fonction, permettra toutefois, dès qu’il sera voté, d’accélérer les procédures
de consultation en y introduisant plus de souplesse. (…)
Au vu des évolutions, je tiendrai compte
de ces considérations, en particulier dans le cadre de la conférence
interministérielle (CIM) de la culture. Nous pourrons en effet débattre de
cette question avec le niveau fédéral à l’occasion de cette dernière et réfléchir
à la manière de procéder à des ajustements.
Concernant le tax shelter (…) se pose la
question de la diminution des montants dans l’ensemble des dossiers, tant dans
le secteur du cinéma que des arts de la scène, en raison de la réforme de
l’impôt des sociétés. On observe ainsi une diminution globale des montants de 5
à 10 millions d’euros. Celle-ci est particulièrement dommageable pour les
secteurs concernés. En ce qui concerne la différence entre les crédits octroyés
pour la création et ceux octroyés pour le fonctionnement, je ne dispose pas ici
du pourcentage exact, mais je vous ferai parvenir la réponse. Celle-ci pourra
être jointe au compte-rendu de la commission.
Quant au dialogue, ma méthode reste
inchangée. Comme je l’ai fait jusqu’à présent, je peux sans difficulté
rencontrer à la fois les représentants à la Chambre et l’ensemble des personnes
qui me le demanderont en vue de renforcer le dialogue nécessaire à
l’aboutissement de ce dossier.
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