3 décembre, journée internationale des personnes handicapées.
Ce matin, je suis intervenue dans l'examen et nous
voterons un texte, qui est assez court. Ce sont dix articles, dix petits
articles mais dix articles qui sont essentiels et lourds de sens pour notre
société. Dix articles, c’est peu, c’est court mais il faut peu de mots pour
dire l’essentiel, comme l’écrivait Paul Eluard.
L’essentiel, il réside d’abord dans
le fait de disposer d’un texte, un texte de loi et disposer d’un tel texte qui
porte intégration de la dimension du handicap dans la conduite politique d’une
institution, c’est très important. DéFI se réjouit donc de l’aboutissement de
ce projet et du vote qui interviendra tout à l’heure.
Pour DéFI, au niveau de la politique
liée au handicap comme dans d’autres politiques, trois points sont
essentiels :
- Fixer des objectifs clairs à atteindre, des objectifs qui sont des caps qui doivent guider l’action politique
- Poser des échéances et les modalités d’évaluation du processus pour atteindre ces objectifs.
- Mettre les moyens nécessaires et utiles pour atteindre ces objectifs, moyens financiers et humains.
Ces trois points sont-ils réunis dans
ce texte-ci ?
Nous nous réjouissons de trouver tout
d’abord dans le projet de décret du Collège, un engagement de législature, un engagement politique clair, des
objectifs qui seront définis pour toute une législature, mais qui en plus ne
sont pas définis qu’entre politiques. En effet, le projet de décret prévoit
l’implication du Conseil consultatif des personnes handicapées afin de fixer les
objectifs stratégiques qui seront réalisés au cours de la législature. Fixer
les objectifs est donc bien prévu dans ce texte.
Ensuite, le décret impose des rapport :
un
rapport intermédiaire et un rapport en fin de législature décliné par
compétence. De plus, le texte décrit ce que ces rapports doivent comprendre.
Nous sommes donc bien avec un processus d’évaluation et avec des lignes
temporelles strictes à respecter. Nous nous en réjouissons.
Pour arriver à ces rapports
intermédiaires et de fin de législature, pour concrétiser les objectifs
stratégiques fixés en début de législature, un groupe de coordination sera mis en place. Celui-ci sera composé de
représentants des cabinets et des services de la Commission communautaire
française. J’exprime une crainte ou une demande à cet égard. J’ai lu
l’avis de certaines associations ou fédérations qui demandent que soit associée
la société civile à ce groupe de
coordination. S’il est peut-être difficile de faire entrer des associations comme
membres à part entière d’un groupe prévu au sein de l’administration, il me
semble essentiel par contre, d’une part de prévoir la formation des personnes qui composeront ce groupe de coordination.
Avoir le « réflexe handicap » ne va pas de soi. Il faut être
sensibilisé. Il faut réfléchir avec un autre point de vue. Je prendrai un
exemple concret : lorsque la Stib et la Région bruxelloise ont décidé de
changer les trams et de choisir des trams gris et noirs, il parait que l’on a
consulté un Conseil consultatif mais personne n’a noté que de choisir des trams
dans des tons harmonieux mais avec des portes en noir et gris foncé, on rendait
difficile l’accès de ces trams aux personnes malvoyantes qui ne repèrent plus
les portes. Il faut vivre le quotidien pour comprendre ce qu’il faut faire,
pour empêcher les situations handicapantes. D’autre part, en plus de la
formation des membres de ce groupe de coordination, je plaide pour que l’on ne
ferme pas la porte à une assistance de
la société civile à ce groupe. Je pense que cela se révèlera utile.
Ma crainte par rapport à
l’introduction du handistreaming ou « réflexe handicap » de façon
transversale dans toutes les politiques, c’est qu’à un moment, ce ne soit pas
pris très au sérieux. Je donnerai l’exemple de la dimension genrée des
politiques mises en œuvre : lorsqu’un subside est octroyé, il faut
compléter un questionnaire, quelques croix pour dire si la dimension genrée est
présente ou non dans l’activité. Quelues croix, ce n’est pas difficile, ça
n’implique pas une réflexion trop longue et ça ne fait pas bouger beaucoup de
choses. Je ne voudrais pas que l’introduction de la dimension du handicap dans
les lignes politiques de la Cocof se résume à un questionnaire avec quelques
croix. Nous aurions raté vraiment la volonté exprimée dans ce texte.
Fixer des objectifs, c’est fait.
Poser un agenda et la méthodologie d’évaluation, c’est fait. Mettre les moyens financiers et humains
pour réussir, là c’est une autre paire de manches parce qu’il ne faut pas
se voiler la face, réussir une vraie politique incluant les personnes en
situation de handicap, cela implique des investissements financiers et humains
importants. Inclure dans l’administration ou dans les sociétés privées des
personnes en situation de handicap, cela demande du temps pour préparer le
travail, pour accepter cette personne ; cela implique des formations,
l’adaptation du lieu, la transformation du travail et beaucoup de volonté… Un
exemple : pour rendre une fête, par exemple la fête de la musique,
accessible à tous, il faut aplanir le sol, prévoir un espace un peu protégé
pour les personnes en situation de handicap, y joindre des WC adaptés, etc…,
tout cela demande des investissements particuliers auxquels les organisateurs
sont obligés souvent de renoncer car ils n’ont pas l’argent qu’il convient.
Je terminerai en disant que ces dix
articles, et tous les textes internationaux, nationaux, régionaux, ne seront
rien si nous ne faisons pas évoluer la
société et le regard que l’on porte sur les personnes en situation de handicap.
Nous avons un enseignement spécialisé de qualité mais qui est scindé de
l’enseignement ordinaire. Dès le plus jeune âge, on sépare les enfants qui
présentent un handicap des autres. Dès le plus jeune âge, on apprend donc à
porter un regard basé sur l’exclusion plutôt que sur l’inclusion. Les pas à
franchir sont encore énormes pour arriver à l’inclusion, mais le pas que nous
poserons aujourd’hui est déjà une très très grande avancée si effectivement, ce
texte se concrétise dans le quotidien de nos administrations et de nos
gouvernements.
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