Parlement francophone bruxellois- Interpellation à la Ministre Frémault
Ce vendredi matin, je suis intervenue en séance plénière du Parlement francophone bruxellois pour attirer l'attention sur la situation des aidants proches. Ci-dessous le texte de mon intervention :
Je remercie d’abord
mes collègues pour l’inscription de ces interpellations et m’inscris dans l’expression
de leurs préoccupations.
Je pense important d’insister sur le fait que les difficultés rencontrées par les aidants
proches ne concernent pas que les jeunes. La situation des aidants proches de
manière générale doit faire l’objet d’une attention et d’actions. On sait par
exemple que souvent, les parents d’enfants handicapés doivent trouver des solutions
et généralement, les mamans quittent leur emploi pour s’occuper de leur enfant.
Cela engendre des difficultés économiques pour les familles. Ensuite, il faut
noter que la problématique des jeunes aidants présente un caractère transversal,
en ce sens qu’elle concerne de nombreuses compétences : enseignement,
santé, action sociale, aide à la jeunesse, aide aux personnes handicapées, etc.
De toute évidence, l’amélioration du quotidien des jeunes aidants et la
revalorisation de leur travail nécessiteront divers types de mesures qui
devront être prises de concert par plusieurs entités fédérées (Fédération
Wallonie-Bruxelles, COCOF et COCOM), chacune agissant dans son champ de
compétence.
Il est
tout-à-fait positif que la Cocof ait pu soutenir la création de la plateforme Jeunes Aidants Proches et la
réalisation de l’enquête dont les résultats ont été récemment communiqués.
Ce sondage mené
dans six écoles bruxelloises auprès d’un échantillon de 1 400 élèves âgés de 18
à 25 ans révèle que 14 % des jeunes Bruxellois interrogés peuvent être
considérés comme des aidants proches, dans la mesure où ils déclarent apporter
une aide régulière de façon continue à un de leurs proches (parent, frère,
sœur, autre membre de l’entourage) se trouvant dans une situation de dépendance
en raison d’une maladie grave, d’un handicap ou d’une assuétude (drogue,
alcool, etc.). Cela signifie que dans une classe de taille moyenne comptant 22
ou 23 élèves, on retrouve, en moyenne, trois jeunes aidants proches.
S’agissant de la
nature de l’aide fournie, le sondage nous apprend que près de deux tiers (64 %)
de ces jeunes aidants proches apportent un soutien psycho-affectif à leur
proche en situation de dépendance, et que 63 % d’entre eux s’occupent des
tâches ménagères. (Par ailleurs, 20 % des
jeunes aidants proches interrogés affirment se charger des soins
médicaux ; 10 % déclarent prodiguer des soins et 7 % fournissent une
assistance dans le cadre des déplacements. Toujours selon cette étude, ces différentes
activités sont très chronophages. Si 43 % des jeunes aidants proches interrogés
consacrent moins de 30 minutes par jour à l’aide qu’ils apportent à leur
proche, 30 % y consacrent entre 30 minutes et une heure. 21 % des jeunes
aidants proches sondés prennent entre une heure et trois heures de leur temps
libre quotidien pour aider leur proche en état de dépendance. Pour 6 % des
jeunes aidants, le temps consacré aux activités d’assistance excède même les
trois heures par jour.) Par ailleurs, il importe de relever que la cette
problématique revêt une dimension de genre. Les résultats de l’enquête montre,
en effet, que deux tiers des jeunes aidants sont des filles.
Avec les
résultats de cette enquête très intéressante, j’aimerais vous poser 4 questions,
4 points importants pour DéFI :
1.
Les relations avec l’Etat fédéral et la loi du 12 mai 2014 :
A l’initiative de la précédente ministre fédérale des Affaires
sociales et de la Santé publique, Laurette Onkelinx, le parlement fédéral a
adopté la loi du 12 mai 2014 relative à la reconnaissance de l’aidant proche
aidant une personne en situation de grande dépendance. Cette loi définit
l’aidant proche comme suit : « L’aidant proche est une personne qui
apporte une aide et un soutien continus et réguliers à la personne aidée.
L’aidant proche doit être majeur ou mineur émancipé. Il doit avoir développé
une relation de confiance et de proximité avec la personne aidée. L’aidant
proche doit exercer le soutien et l’aide à titre non professionnel, de manière
gratuite et avec le concours d’au moins un intervenant professionnel. »
Avec cette enquête, ne pourriez-vous soulever deux points lors d’un
prochain CIM social/santé ?
D’une part, il importe de relever que la définition figurant dans la
loi de 2014 exclue les mineurs aidants proches. En d’autres termes, l’ensemble
des adolescents âgés de 12 à 18 ans qui fournissent une aide quotidienne à un
proche en situation de dépendance ne pourront pas jouir du statut d’aidant
proche. Les chiffres de l’étude montre que la situation des jeunes est importante.
Un évolution devrait avoir lieu.
D’autre part, si la reconnaissance légale du statut de l’aidant
proche constitue, à n’en pas douter, une première étape très importante d’un
point de vue symbolique, on doit néanmoins constater que pour l’heure, ce
statut n’est pas encore suivi d’effet. Plus de trois ans après l’entrée en
vigueur de la loi du 12 mai 2014, les arrêtés d’exécution n’ont toujours pas
été adoptés par le gouvernement fédéral. Selon l’ASBL Jeunes Aidants Proches,
ces arrêtés d’application ont déjà été adoptés, mais ils sont actuellement
bloqués au cabinet de l’actuelle ministre fédérale en charge des Affaires
sociales et de la Santé publique, Maggie De Block (Open VLD). De leur côté, les
mutuelles ont déjà commencé à reconnaître certains de leurs affiliés comme des
aidants proches, et à leur octroyer certaines aides spécifiques. En revanche,
le gouvernement fédéral tarde à appliquer la loi du 12 mai 2014 et ne semble
pas disposer à accorder des droits spécifiques aux personnes qui bénéficieront
du statut d’aidant proche. Quid ? En savez-vous plus ?
2.
Les contacts avec la FWB :
Mr du bus a récemment interrogé le Ministre Schyns sur le sujet. Je
n’ai pas entendu d’avancées dans la réponse de la ministre mais forte des
résultats de l’enquête, ne pourriez-vous
pas, Madame la ministre, prendre contact avec votre collègue responsable de l’enseignement
en Fédération Wallonie Bruxelles. Il y a, pour moi, au moins deux pistes à soulever
à la Fédération :
-
Faciliter l’inscription dans
une école proche du domicile. On le sait le fameux et décrié décret inscription
envoie parfois les élèves à l'autre bout de la région lorsqu'ils entrent en
secondaire. Un statut spécifique « aidant proche » devrait permettre
l'inscription prioritaire dans une école de proximité afin que l’étudiant puisse rejoindre plus
facilement, plus rapidement le domicile familial.
-
Etendre le statut d’étudiant à
besoins spécifiques (EBS) aux jeunes aidants proches qui fréquentent
l’enseignement supérieur. Comme vous le savez, le statut EBS peut actuellement
être accordé à différentes catégories d’étudiants : les étudiants
souffrant d’un handicap, les étudiants sportifs de haut niveau, les étudiants
artistes ou encore les étudiants entrepreneurs. Grâce au statut EBS, ces divers
groupes d’étudiants peuvent négocier avec les autorités académiques un programme
d’accompagnement individualisé leur permettant notamment d’aménager leurs
horaires de cours, leurs sessions d’examens ou les dates de remise des travaux.
Ne serait-il pas légitime d’accorder un statut EBS aux jeunes aidants proches
qui éprouvent d’énormes difficultés à suivre leur cursus, tout en consacrant de
nombreuses heures à leur proche en situation de grande dépendance ? Si les
aidants pouvaient eux aussi bénéficier d’un programme d’accompagnement
individualisé (aménagement des horaires de cours et des sessions d’examens),
ils pourraient continuer à apporter une aide à leur parent ou à leur frère/sœur
en situation de dépendance, sans pour autant négliger leurs études.
3.
Enfin, dernier point, je
voudrais insister sur des points qui me semblent essentiels : l’information, la proximité et la formation
des aidants proches. Au Québec, ont été mis en place pour les proches
aidants, des services d’aide de proximité, au cœur des quartiers, des
municipalités. Les aidants proches peuvent y trouver des formations et
informations intéressantes. Quels sont vos contacts avec les CPAS et quel rôle
leur confier ? Même question pour les services d’aides à domicile ?
Les services communaux de proximité ?
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire
Merci de laisser votre avis et vos suggestions.