10 novembre 2017

Il faut prendre des mesures parfois simples mais vraiment utiles, pour tenir compte de la situation des aidants proches


Parlement francophone bruxellois- Interpellation à la Ministre Frémault
Ce vendredi matin, je suis intervenue en séance plénière du Parlement francophone bruxellois pour attirer l'attention sur la situation des aidants proches. Ci-dessous le texte de mon intervention : 
Je remercie d’abord mes collègues pour l’inscription de ces interpellations et m’inscris dans l’expression de leurs préoccupations.
Je pense important d’insister sur le fait que les difficultés rencontrées par les aidants proches ne concernent pas que les jeunes. La situation des aidants proches de manière générale doit faire l’objet d’une attention et d’actions. On sait par exemple que souvent, les parents d’enfants handicapés doivent trouver des solutions et généralement, les mamans quittent leur emploi pour s’occuper de leur enfant. Cela engendre des difficultés économiques pour les familles. Ensuite, il faut noter que la problématique des jeunes aidants présente un caractère transversal, en ce sens qu’elle concerne de nombreuses compétences : enseignement, santé, action sociale, aide à la jeunesse, aide aux personnes handicapées, etc. De toute évidence, l’amélioration du quotidien des jeunes aidants et la revalorisation de leur travail nécessiteront divers types de mesures qui devront être prises de concert par plusieurs entités fédérées (Fédération Wallonie-Bruxelles, COCOF et COCOM), chacune agissant dans son champ de compétence.
Il est tout-à-fait positif que la Cocof ait pu soutenir la création de la  plateforme Jeunes Aidants Proches et la réalisation de l’enquête dont les résultats ont été récemment communiqués.
Ce sondage mené dans six écoles bruxelloises auprès d’un échantillon de 1 400 élèves âgés de 18 à 25 ans révèle que 14 % des jeunes Bruxellois interrogés peuvent être considérés comme des aidants proches, dans la mesure où ils déclarent apporter une aide régulière de façon continue à un de leurs proches (parent, frère, sœur, autre membre de l’entourage) se trouvant dans une situation de dépendance en raison d’une maladie grave, d’un handicap ou d’une assuétude (drogue, alcool, etc.). Cela signifie que dans une classe de taille moyenne comptant 22 ou 23 élèves, on retrouve, en moyenne, trois jeunes aidants proches.
S’agissant de la nature de l’aide fournie, le sondage nous apprend que près de deux tiers (64 %) de ces jeunes aidants proches apportent un soutien psycho-affectif à leur proche en situation de dépendance, et que 63 % d’entre eux s’occupent des tâches ménagères. (Par ailleurs, 20 % des jeunes aidants proches interrogés affirment se charger des soins médicaux ; 10 % déclarent prodiguer des soins et 7 % fournissent une assistance dans le cadre des déplacements. Toujours selon cette étude, ces différentes activités sont très chronophages. Si 43 % des jeunes aidants proches interrogés consacrent moins de 30 minutes par jour à l’aide qu’ils apportent à leur proche, 30 % y consacrent entre 30 minutes et une heure. 21 % des jeunes aidants proches sondés prennent entre une heure et trois heures de leur temps libre quotidien pour aider leur proche en état de dépendance. Pour 6 % des jeunes aidants, le temps consacré aux activités d’assistance excède même les trois heures par jour.) Par ailleurs, il importe de relever que la cette problématique revêt une dimension de genre. Les résultats de l’enquête montre, en effet, que deux tiers des jeunes aidants sont des filles.
Avec les résultats de cette enquête très intéressante, j’aimerais vous poser 4 questions, 4 points importants pour DéFI :
1.     Les relations avec l’Etat fédéral et la loi du 12 mai 2014 :
A l’initiative de la précédente ministre fédérale des Affaires sociales et de la Santé publique, Laurette Onkelinx, le parlement fédéral a adopté la loi du 12 mai 2014 relative à la reconnaissance de l’aidant proche aidant une personne en situation de grande dépendance. Cette loi définit l’aidant proche comme suit : « L’aidant proche est une personne qui apporte une aide et un soutien continus et réguliers à la personne aidée. L’aidant proche doit être majeur ou mineur émancipé. Il doit avoir développé une relation de confiance et de proximité avec la personne aidée. L’aidant proche doit exercer le soutien et l’aide à titre non professionnel, de manière gratuite et avec le concours d’au moins un intervenant professionnel. »
Avec cette enquête, ne pourriez-vous soulever deux points lors d’un prochain CIM social/santé ?
D’une part, il importe de relever que la définition figurant dans la loi de 2014 exclue les mineurs aidants proches. En d’autres termes, l’ensemble des adolescents âgés de 12 à 18 ans qui fournissent une aide quotidienne à un proche en situation de dépendance ne pourront pas jouir du statut d’aidant proche. Les chiffres de l’étude montre que la situation des jeunes est importante. Un évolution devrait avoir lieu.
D’autre part, si la reconnaissance légale du statut de l’aidant proche constitue, à n’en pas douter, une première étape très importante d’un point de vue symbolique, on doit néanmoins constater que pour l’heure, ce statut n’est pas encore suivi d’effet. Plus de trois ans après l’entrée en vigueur de la loi du 12 mai 2014, les arrêtés d’exécution n’ont toujours pas été adoptés par le gouvernement fédéral. Selon l’ASBL Jeunes Aidants Proches, ces arrêtés d’application ont déjà été adoptés, mais ils sont actuellement bloqués au cabinet de l’actuelle ministre fédérale en charge des Affaires sociales et de la Santé publique, Maggie De Block (Open VLD). De leur côté, les mutuelles ont déjà commencé à reconnaître certains de leurs affiliés comme des aidants proches, et à leur octroyer certaines aides spécifiques. En revanche, le gouvernement fédéral tarde à appliquer la loi du 12 mai 2014 et ne semble pas disposer à accorder des droits spécifiques aux personnes qui bénéficieront du statut d’aidant proche. Quid ? En savez-vous plus ?

2.     Les contacts avec la FWB :
Mr du bus a récemment interrogé le Ministre Schyns sur le sujet. Je n’ai pas entendu d’avancées dans la réponse de la ministre mais forte des résultats de  l’enquête, ne pourriez-vous pas, Madame la ministre, prendre contact avec votre collègue responsable de l’enseignement en Fédération Wallonie Bruxelles. Il y a, pour moi, au moins deux pistes à soulever à la Fédération :
-        Faciliter l’inscription dans une école proche du domicile. On le sait le fameux et décrié décret inscription envoie parfois les élèves à l'autre bout de la région lorsqu'ils entrent en secondaire. Un statut spécifique «  aidant proche » devrait permettre l'inscription prioritaire dans une école de proximité  afin que l’étudiant puisse rejoindre plus facilement, plus rapidement le domicile familial.
-        Etendre le statut d’étudiant à besoins spécifiques (EBS) aux jeunes aidants proches qui fréquentent l’enseignement supérieur. Comme vous le savez, le statut EBS peut actuellement être accordé à différentes catégories d’étudiants : les étudiants souffrant d’un handicap, les étudiants sportifs de haut niveau, les étudiants artistes ou encore les étudiants entrepreneurs. Grâce au statut EBS, ces divers groupes d’étudiants peuvent négocier avec les autorités académiques un programme d’accompagnement individualisé leur permettant notamment d’aménager leurs horaires de cours, leurs sessions d’examens ou les dates de remise des travaux. Ne serait-il pas légitime d’accorder un statut EBS aux jeunes aidants proches qui éprouvent d’énormes difficultés à suivre leur cursus, tout en consacrant de nombreuses heures à leur proche en situation de grande dépendance ? Si les aidants pouvaient eux aussi bénéficier d’un programme d’accompagnement individualisé (aménagement des horaires de cours et des sessions d’examens), ils pourraient continuer à apporter une aide à leur parent ou à leur frère/sœur en situation de dépendance, sans pour autant négliger leurs études.

3.     Enfin, dernier point, je voudrais insister sur des points qui me semblent essentiels : l’information, la proximité et la formation des aidants proches. Au Québec, ont été mis en place pour les proches aidants, des services d’aide de proximité, au cœur des quartiers, des municipalités. Les aidants proches peuvent y trouver des formations et informations intéressantes. Quels sont vos contacts avec les CPAS et quel rôle leur confier ? Même question pour les services d’aides à domicile ? Les services communaux de proximité ?

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