30 avril 2019

Avenir des espaces Points Culture et des Médiathèques sous gestion locale


Parlement de la Fédération Wallonie-Bruxelles - Commission Culture - 23/04/2019

Le 23 avril dernier, en commission parlementaire, j'ai interpellé la ministre de la Culture au sujet du prêt médias. 
En effet, il y a quelques jours, un article de presse faisait part de la décision de mettre fin à la location du prêt média au sein des espaces « Point Culture ». L’évolution de la consommation des médias de musique et de film via le streaming entraîne, on le sait, une diminution très forte du prêt de média physique.
Lors de la dernière séance plénière, la ministre a répondu à deux questions d’actualité mais des questions supplémentaires et des précisions sont nécessaires car d’une part, la situation des médiathèques sous gestion locale n’a pas été abordée et d’autre part, un conseil d’administration de Points Culture s’est tenu début avril.
Voici une dizaine d’années que le prêt média diminue drastiquement posant la question de la nécessité et de l’utilité de poursuivre du prêt média via les médiathèques. La Fédération Wallonie-Bruxelles s’est d’abord séparée de certaines médiathèques devenues sous gestion locale, les communes choisissant soit de les intégrer aux bibliothèques, aux centres culturels soit de poursuivre dans un espace propre de médiathèque. D’autre part, la médiathèque de la Communauté française a évolué vers PointCulture réalisant une transformation du travail vers des activités de médiation, d’information, de découverte de talents, de formation …
L’annonce aujourd’hui de mettre fin au prêt en 2020 dans les espaces PointCulture, de ramener le prêt vers les bibliothèques et d’arrêter dès à présent l’achat de nouveautés pose non seulement la question de l’avenir du prêt mais aussi de l’avenir même des espaces PointCulture.
J’aimerais dès lors interpeller la ministre, d’une part, sur la nouvelle convention avec PointCulture et avec les médiathèques sous gestion locale.

  • Comment la fin du prêt média en 2020 est-elle intégrée dans ces conventions ?
  • Le prêt, même s’il a fortement diminué, reste quand même le poste principal de fréquentation des Points Culture. Pouvez-vous apporter une analyse en termes de fréquentation ?


Ensuite, j’aimerais aborder les questions pratiques de cette disparition ou de cette évolution du prêt.
On évoque un rapprochement avec les bibliothèques principalement. C’est une excellente idée. Il aurait peut-être fallu l’imposer il y a près de 10 ans. La difficulté qui transparait aujourd’hui porte d’une part, sur les statuts du personnel puisque le personnel des bibliothèques est parfois du personnel communal, dans d’autres cas du personnel d’asbl. Y a-t-il déjà une réflexion à ce sujet ?

Autre difficulté, le problème informatique. PointCulture a développé un système informatique propre mais les bibliothèques disposent d’autres programmes. Les bibliothèques ne partagent d’ailleurs pas toutes le même système de thésaurus. Quid ? Qui prendra en charge le transfert des données et l’adaptation du logiciel des bibliothèques ?
QuUn question se pose aussi par rapport aux bibliothèques :  la disparité de tarif. Les livres sont prêtés pratiquement gratuitement tandis que pour les médias, CD, DVD et jeux, etc., un tarif est demandé. Comment voyez-vous l’évolution ?
L’annonce de ces derniers entraîne d’autres questions :
  • Qu’en est-il au niveau juridique de l’évolution de la structure PointCulture ?
  • Quelle évolution prévoyez-vous pour les médiathèques sous gestion locale ?
  • Comment sont-elles informées de l’évolution et de l’avenir ? Il faut évidemment pouvoir prévoir aussi pour ces médiathèques sous gestion locale l’avenir au niveau budgétaire, au niveau du personnel etc..
  • On parle beaucoup de rapprochement avec les bibliothèques mais quid du rapprochement avec les centres culturels ? En effet, la fonction de prêt pourrait logiquement se rapprocher des bibliothèques mais toute la fonction de médiation, d’information culturelle, etc.. pourrait se rapprocher des centres culturels. Comment les centres culturels ont-ils été intégrés au processus de réflexion du devenir de PointCulture et des espaces de PointCulture ?
  • Qu’en est-il de l’avenir du personnel de PointCulture et des médiathèques sous gestion locale ? Où en sont l’information et les négociations avec ce personnel ?
  • Et pour terminer une question très pratique et immédiate : les médiathèques sous gestion locale proposent les médias en passant par le fonds venant de PointCulture. L’annonce de l’arrêt de l’acquisition de nouveautés pose un vrai problème. Les questions posées par les emprunteurs sont nombreuses. Qu’en est-il ? Y a-t-il vraiment fin des acquisitions dès maintenant ? Comment les médiathèques sous gestion locale et comment les espaces PointCulture informent-ils leurs emprunteurs qui sont encore quelques milliers quand même en Fédération ?



Débat en commission à la suite de l’interpellation de Caroline Persoons

M. Matteo Segers (Ecolo). – Nous avons été fortement sollicités au sujet de l’avenir du prêt de médias et de PointCulture. Madame Persoons a parlé d’une convention, a-t-elle été signée ou est-elle en phase de signature? La convention qui devait lier PointCulture pour les deux ans à venir doit se calquer sur la nécessité de l’opérateur, qui est dans un exercice social qui n’est pas classique. Il existe un risque que la convention mette en péril le personnel, car le décalage de date tel qu’il était évoqué ne permettait pas d’envisager une année de saison sereine. J’en viens ensuite à la préservation du patrimoine. Comment pouvons-nous garantir que ce patrimoine continuera d’exister et sera encore accessible? Il s’agit ici de l’exercice des droits culturels. La question sous-jacente est la suivante: qui reprend en main le maintien du patrimoine? PointCulture est-il associé à l’avenir de ce patrimoine? Comment le sera-t-il? Ou est-ce la Communauté française qui reprend la main sur ce patrimoine? Qui en est le propriétaire et comment peut-on le garantir? Je pense qu’une majorité des partis politiques vont vouloir s’assurer que ce patrimoine ne sera pas dilapidé, mais qu’il sera maintenu, notamment pour les opérations de médiation et de mise en lien avec les différents opérateurs culturels et ceux qui sont en première ligne avec les publics, y compris les écoles.
 Débat de la Ministre en commission 
Mme Alda Greoli, vice-présidente du gouvernement et ministre de la Culture et de l’Enfance. – Madame Persoons, je rejoins votre analyse quant à la collaboration avec les bibliothèques pour le prêt de médias. Cette collaboration aurait dû être envisagée par PointCulture et la Communauté française depuis bien longtemps. Ce n’était pas le cas dans le contrat-programme arrivé à échéance; c’est désormais chose faite dans une convention transitoire bel et bien signée, qui oblige l’opérateur à achever la réorganisation de l’association. Cette réorganisation avait été lancée en 2007, la convention insiste sur la volonté d’aboutir. En outre, les nouvelles obligations de résultat sont fixées. J’espère qu’elles permettront à l’association, à ses équipes ainsi qu’à la Communauté française d’y voir plus clair avant de s’engager à plus long terme. Les missions de PointCulture sont essentielles et doivent être remplies en tenant compte des évolutions et des collaborations nécessaires et obligatoires avec les bibliothèques et les centres culturels. Par ailleurs, les écoles doivent également être incluses dans le processus. Le rôle de médiation que PointCulture semble vouloir placer au centre de sa philosophie doit s’effectuer en collaboration avec les écoles. Dès le premier semestre 2019, PointCulture devra communiquer à la Fédération WallonieBruxelles son plan d’action détaillant les modalités de cette évolution. Concernant le prêt de médias, il s’agit bien d’un changement de lieu d’activité. Madame Persoons, j’insiste sur le fait qu’il n’est pas question d’abandonner ni le prêt ni l’acquisition de médias. Toutefois, un changement de lieu est nécessaire et cette activité devra être déplacée dans les bibliothèques ou dans les centres culturels, par exemple. Cette mission sera en tout cas effectuée en collaboration avec d’autres acteurs de la démocratie culturelle. En ce qui concerne le statut du personnel et le niveau technique, plusieurs schémas sont envisageables. J’attends les propositions de l’association, qui sera concertée en interne – je ne peux pas imaginer que des modifications soient réalisées sans concertation sociale – et avec les autres parties prenantes que sont les bibliothèques et les médiathèques locales. Les médiathèques locales, qui font également l’objet d’une convention transitoire de deux ans calquée sur celle de PointCulture, seront bien entendu associées aux discussions. La fin des acquisitions de médias décidée par PointCulture devra être justifiée et mise en perspective dans le plan d’action. De façon plus générale, les questions relatives à la fréquentation et aux tarifs seront présentées sur la base d’un plan financier. Je pars du principe que PointCulture a décidé de mettre fin aux acquisitions de médias en attendant la réorganisation et je ne peux imaginer qu’aucune initiative d’acquisition ne voie le jour à l’avenir. Concernant les centres culturels, la convention de PointCulture prévoit qu’il développera et prendra en charge des animations au service des acteurs de l’action territoriale. La collaboration avec les centres culturels et les autres centres, tels que les centres d’expression et de créativité (CEC), devrait donc se renforcer au cours de la période transitoire. Monsieur Segers, en ce qui concerne votre question sur l’avenir du patrimoine, la convention prévoit qu’il sera déterminé dans les deux ans. Il n’est pas question de faire l’impasse sur le patrimoine. Nous pourrons envisager la manière de gérer le dossier patrimonial dans le cadre des nouvelles collaborations. Dans ce dossier comme dans bien d’autres au cours de mon mandat, j’ai très clairement choisi de soutenir l’opérateur dans les changements à l’œuvre et de clarifier les règles de gouvernance, tout en veillant à ne pas entraver la liberté associative et, dès lors, à ne pas me substituer à l’opérateur lui-même. Le conseil d’administration de PointCulture a donc une part de responsabilité. Je rappelle qu’il s’agit d’une ASBL en bonne et due forme, et non d’un service public délégué décentralisé de notre administration. C’est aussi à cette ASBL de me faire des propositions. Il n’empêche qu’une mission de service public, fondamentale pour la démocratie culturelle, est remplie.

Mme Caroline Persoons (DéFI). – Je vous remercie pour ces précisions, Madame la Ministre, bien qu’elles ne correspondent pas à la réalité du terrain. Vous affirmez qu’il ne faut pas abandonner les acquisitions; or c’est déjà le cas. Les médiathèques sous gestion locale reçoivent des courriels de responsables des acquisitions de PointCulture les informant, par exemple, qu’ils doivent désormais leur renvoyer l’ensemble des CD de musique classique et que de nouvelles acquisitions ne seront plus possibles. C’est regrettable, car comme l’a dit M. Segers, il s’agit là d’un patrimoine que ne pourra plus découvrir le public. Je prends l’exemple d’un de mes enfants, mélomane, qui fréquente PointCulture à Louvainla-Neuve. Il en revient avec de la musique qu’il n’aurait pas découverte via le streaming, tombant par hasard sur des CD qui lui plaisent. J’entends bien la responsabilité du conseil d’administration de PointCulture, liée à ses relations avec la Fédération Wallonie-Bruxelles, l’administration et le gouvernement. Ce que permet PointCulture est intéressant, mais pourrait être pris en charge par les centres culturels. J’en arrive à la réaction des bibliothécaires. Une médiathèque nécessite de pouvoir écouter les différents CD mis en location. Une bibliothèque requiert, quant à elle, le silence. Les bibliothécaires affirment donc que ces espaces sont très différents. Mais je pense qu’il faut continuer à soutenir les communes et les bibliothèques qui hébergent encore des médiathèques. Lorsque la Fédération Wallonie-Bruxelles demande un plan budgétaire quinquennal et que l’on apprend tout à coup qu’il n’y aura sans doute plus de nouveaux médias, cela demande réflexion. Une communication précise et complète pour les utilisateurs, le personnel et les lieux concernés est nécessaire.

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