23 février 2016

Numerus clausus : DéFI réclame d'urgence d'établir un cadastre dynamique qui tienne compte des besoins en médecins en Fédération Wallonie-Bruxelles


Fédération Wallonie-Bruxelles - Commission de l'enseignement supérieur - Mardi 23/02/2016 
Ce mardi, j'ai interpellé le Ministre Marcourt sur un dossier toujours brûlant d'actualité, depuis 20 ans, et qui conditionne l'avenir de milliers d'étudiants mais aussi de notre qualité des soins de santé, à savoir le numerus clausus. 
Mon interpellation a porté sur deux question principales : 
Quelle définition des besoins de la Fédération Wallonie-Bruxelles en médecins ? Quand les étudiants actuels seront-ils certains de pouvoir obtenir un n° ? 

Accès aux compte-rendu du débat et de la réponse du ministre : cliquez 

Le rapport 2015 sur la performance du système de santé belge publié par le Centre Fédéral d’Expertise des Soins de Santé invite les responsables politiques à « déterminer les priorités vers lesquelles les efforts seront dirigés » car « nos ressources sont limitées et les nécessités sont multiples »[1]. En effet, « les indicateurs concernant la disponibilité actuelle des ressources humaines dans le domaine de la médecine générale (…) mettent en question la capacité du système à répondre  aux besoins de santé futurs liés à l’évolution démographique. La proportion de (nouveaux) médecins généralistes dans l’ensemble des spécialités médicales n’atteint pas les quotas fixés par la Commission de Planification et l’âge moyen des généralistes en activité augmente plus rapidement que celui des spécialistes »[2].

Voici quelques constats et chiffres préoccupants du rapport KCE :
  • En 2013, la densité des médecins en activité en Belgique était de 2,95/1000 habitants, ce qui est inférieur à la moyenne européenne, étant de 3,41/1000 habitants.
  • Plus de 38% des patients ont dû attendre plus de 2 semaines pour voir un spécialiste.
  • Bien que le pourcentage de nouveaux médecins diplômés pour 100.000 habitants soit passé de 7,1 à 10,2 entre 2008 et 2014, un système de lissage a été mis en place pour permettre aux universités de puiser dans leurs quotas futurs pour assurer les agréments des étudiants actuels.
  • De plus, 26% des nouveaux médecins francophones deviennent médecins généralistes, alors que cette proportion devrait atteindre 40% selon la Commission de planification. 
  • En conséquence, l’âge moyen des médecins généralistes est aujourd’hui de 52,8 ans.
  • Pour conclure, si cette situation se prolonge, elle risque de provoquer très rapidement des problèmes dans le fonctionnement des soins de première ligne. Une étude de l’UCL a montré que si l’on poursuit sur cette voie, de 2021 à 2027 seuls 22% des médecins francophones retraités pourraient être remplacés.
Afin de réagir de manière proportionnée, il convient de fixer des objectifs clairs et chiffrés en ce qui concerne les besoins de la Fédération Wallonie-Bruxelles en nouveaux médecins généralistes actuels et dans les années futures.
Rappelons qu’en 2015, l’OMS soulignait l’absence de réponse adéquate au vieillissement de la population par manque de remplacements des médecins. En même temps, le nombre de médecins étrangers qui exercent en dehors des quotas a augmenté de 33% depuis 2010.

Ces différents points rendent indispensables les distinctions suivantes :
-    Entre d’une part les quotas fixés et d’autre part leur pertinence ;
-    Entre le cadastre dynamique des médecins (offre effective), la consommation passée et actuelle de soins, et enfin, les besoins actuels et futurs par profession de santé.

Madame Deliège, lors des auditions du 27 janvier 2015, précisait que, dans un premier temps, l’estimation des besoins est un travail scientifique, tandis que la décision de commander ces travaux et d’en tirer des décisions collectives relève des responsables politiques.

Monsieur Englert, pendant les auditions du 10 février 2015, ajoutait que la Commission de planification ne peut pas définir les besoins car elle n’en a pas la légitimité politique. Pourtant, elle a indiqué, par le passé, que son objectif était de maintenir constante la force de travail, sans que cette décision n’ait été prise par les instances légitimes. A suivre ces propos, il faut nous réapproprier le choix politique de produire le diagnostic de nos besoins en Fédération Wallonie-Bruxelles, et d’y instaurer nos priorités, afin d’assurer la soutenabilité de nos services de soins de santé pour les années futures.

Enfin, Madame Somer renchérissait : « le seul besoin pris en compte est la consommation de soins actuelle de la population par tranche d’âge projetée en fonction du vieillissement de la population (…) La cellule de planification n’a pas pour l’instant des données de besoins en soin de santé autres que la consommation en soins observée d’où la difficulté de définir où se situent les pénuries »[3].

Je voudrais enfin ajouter les déclarations de Mme De Block en commission santé le 03 février 2016 : « Le scénario de base est un scénario de continuité qui reproduit pour le futur les mêmes tendances que celles observées par le passé – seule la démographie évolue, et avec elle, la structure de consommation des soins. Les scénarios alternatifs envisagent des évolutions différentes et modélisent l’impact de décisions politiques ou du changement des paramètres du modèle »[4] .
Si je cite ces différentes données et rapports, c'est pour les mettre en corrélation avec la situation intenable d'attente que vivent les étudiants, leurs familles, les professeurs et hôpitaux mais aussi la population par rapport à la qualité des soins de santé demain.

Mes questions au Ministre Marcourt :

  1. Quid des numéros INAMI pour les étudiants actuels ? DéFi rejoint l'analyse du CIUM qui dénonce avec force cette prise d'otage étudiante par les acteurs politiques concernés par ce dossier. Les doyens ont-ils encore légalement la capacité d'établir la sélection des candidats habilités à recevoir une attestation et à les délivrer alors que le décret Bologne a été abrogé et remplacé par le "décret Paysage" qui ne prévoit plus expressis verbis de ce jury et de cette compétence ? 

    Réponse du Ministre Marcourt
    : Le lissage, porté sur 5 ou 10 ans pénalise les futurs cohortes. "On sacrifie les cohortes futurs". Les doyens se trouvent devant une stratégie de choix cornélien. Par rapport au jury inter-universitaire des doyens, l'art. 82 du décret paysage permet, selon le ministre, la collaboration entre établissements. L'attribution relève des personnes en charge de la direction des études donc il n'y aurait pas de problèmes. Pour conforter cette interprétation et ne laisser planer aucun doute, le ministre annonce un projet de décret déjà passé en 1ere lecture au gouvernement. Il n'y a pas encore d'accord de coopération entre le Fédéral et la FWB et cela pour des des raisons factuelles, selon le ministre. Vu l'absence de cadastre, de fixation des chiffres pour le futur, le
    dossier bloque. Mais cela devrait se dégager après Pâques.
     


    Pour DéFI, il faut connaître exactement tous les effets à court, moyen et long terme du lissage négatif. Il faut tenir compte des différences de situation entre Communautés en matière de pénurie.  DéFI défend une révision de la clé 60nl/40fr de répartition des numéros INAMI. Les étudiants non-résidants en Belgique représentent 30% des cohortes francophones, et 5% dans les facultés flamandes.  Les pénuries sont claires dans certaines régions en Wallonie (cfr situation au Luxembourg dénoncé par DéFI) et à Bruxelles.  
  2. Quelle réception faites-vous du rapport de performance 2015 du Centre Fédéral d’Expertise des soins de santé ? Y-a-t-il une analyse officielle posée par le Fédération Wallonie-Bruxelles ?
  3. Réponse du Ministre Marcourt : Le rapport KCE constitue est le socle de négociation et montre la nécessité d'aboutir à un cadastre dynamique. La répartition communautaire des codes pose problème. Les pénuries existent effectivement et quatre nouveaux domaines sont pointés pour leur manque de praticiens
  4. Dans quel scénario positionnez-vous la Fédération Wallonie-Bruxelles : celui de base visant la continuité ou un alternatif, et dans ce cas, quelle alternative ?Réponse du Ministre Marcourt : Le groupe de travail inter-cabinet planche sur de nouveaux critères. Des scénarios alternatifs doivent être proposés car la situation est particulière du côté francophone. Les cohortes sont différentes au nord et au sud du pays.
  5. Quels sont les chiffres que le FWB présente lors des négociations avec le Fédéral et au GT « professions de santé » pour représenter les besoins actuels et futurs (en veillant à ne pas les assimiler à notre consommation actuelle) de la Fédération Wallonie-Bruxelles en médecins et professions de santé ?Réponse du Ministre Marcourt :////
  6. Quelles solutions préconisez-vous pour augmenter le nombre de nouveaux médecins généralistes ?Réponse du Ministre Marcourt : des quotas revus avec un cadastre dynamique
  7. Quelles sont les discussions menées avec le Fédéral sur le déséquilibre entre le surplus de diplômés (par rapport aux quotas) et la pénurie de généralistes ? Ces discussions entament-elles le débat sur la pertinence des contingentements ?
    Réponse du Ministre Marcourt : Le travail de la commission de la planification devrait remettre le résultat de ces travaux après les vacances de Pâques




[1] « Préface », Rapport Performance, Centre Fédéral d’Expertise des Soins de Santé,  2015, p.1
[2] « Messages clés », Rapport Performance, Centre Fédéral d’Expertise des Soins de Santé,  2015,
[3] Aurélie SOMER, chef de la cellule de planification de l’offre des professions des soins de santé, SPF Santé publique, Rapport de commission 75 (2014-2015) – N°1, p. 32. 
[4] Maggie DE BLOCK, CRABV 54, COM 333, 03/02/2016, p. 27.

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